
Face à la recrudescence des pénuries et à la hausse des prix de plusieurs denrées de première nécessité sur le marché guinéen, Mbani Sidibé, acteur engagé dans la défense des consommateurs, tire la sonnette d’alarme. Dans un entretien accordé à notre rédaction, il dénonce un système de régulation défaillant et appelle à des réformes urgentes au sein du ministère du Commerce.
Riz, sucre, farine, ciment… De plus en plus de produits essentiels se raréfient ou atteignent des prix difficilement accessibles pour le consommateur moyen. Une situation que M. Sidibé qualifie de « constat très amer », pointant du doigt une stratégie commerciale consistant à créer une rupture artificielle pour justifier l’augmentation des prix.
« Même après la signature du protocole d’accord du 12 juillet, les prix plafonnés ne sont pas respectés. Le riz, par exemple, devait être vendu entre 270 000 et 280 000 GNF, mais sur le terrain, c’est tout autre chose. Le cas de la farine commence à peine à se stabiliser, et encore, ce n’est pas effectif partout », affirme-t-il.
Le ciment, indispensable à la construction, est devenu quasiment un produit de luxe. « Cela fait 4 à 7 mois qu’il y a une pénurie sur les marchés. Beaucoup de chantiers sont à l’arrêt à cause de cette situation. Ce n’est plus seulement une affaire de commerçants, c’est une défaillance de l’État, qui ne joue plus son rôle d’anticipation et de régulation », déplore M. Sidibé.
Selon lui, le ministère du Commerce a failli à sa mission, notamment en s’appuyant sur des structures qu’il juge inadaptées pour négocier les prix et garantir l’approvisionnement du marché.
« Le gouvernement se trompe d’interlocuteurs. Ce n’est pas avec la Chambre nationale du commerce qu’il faut signer des protocoles, mais avec les vrais importateurs, industriels et artisans. La Chambre du commerce n’est qu’une structure de représentation, elle ne peut pas être tenue juridiquement responsable en cas de non-respect des engagements », précise-t-il.
M. Sidibé rappelle que la loi sur la liberté des prix donne au ministère les outils pour agir : contrôle des stocks, fixation des prix, inspections… mais ces dispositifs sont rarement mis en œuvre de façon efficace.
« Les agents de contrôle ne doivent pas agir comme une parade. Il faut des inspections discrètes et régulières, pas des descentes en groupe qui alertent les commerçants et faussent les constats », critique-t-il.
Qualité, quantité et transparence en question
Au-delà des prix, la qualité des produits est aussi en cause. « Même le riz présenté comme des sacs de 50 kg pèse parfois moins, et les consommateurs s’en plaignent. Il faut donc des contrôles stricts non seulement sur le poids, mais aussi sur la qualité et les conditions de conservation », martèle-t-il.
M. Sidibé appelle les consommateurs à rester vigilants et solidaires, en attendant des mesures concrètes de la part des autorités.
« Nous sommes en train de recenser plus d’une vingtaine de produits dont les prix sont anormalement modifiés. Nous allons saisir officiellement le ministère du Commerce pour qu’il prenne ses responsabilités, notamment dans le cas du ciment. Le combat continue. »
Tenema Doumbouya pour moyaguinee.com
















